COMMUNIQUÉ DE PRESSE DU 8 FEVRIER 2022 - Chips Act : le cep met en garde l'UE contre une aberration de la politique industrielle

Berlin/Fribourg. L'Union européenne veut investir environ 45 milliards d'euros dans la production de semi-conducteurs de pointe d'ici 2030. Pour ce faire, la Commission assouplit, avec le Chips Act, les règles strictes en matière d'aides d'État en vigueur encore aujourd’hui. Avec ce changement de paradigme, l'Europe veut réduire sa dépendance vis-à-vis des Etats-Unis et de la Chine et devenir plus autonome dans la recherche et la production. Bruxelles réagit ainsi aux problèmes de livraison dont souffre notamment le secteur automobile allemand. Le groupe de réflexion Centrum für Europäische Politik (cep) estime que cette loi est une aberration en matière de politique industrielle.

"L'objectif de la Commission de réduire la dépendance industrielle et technologique de l'Europe en période de conflits géopolitiques est en principe légitime. Mais en limitant la concurrence et le libre-échange, Bruxelles s'engage sur une voie dangereuse en matière de politique industrielle, en contrevenant elle-même aux principes fondamentaux de l'UE", déclare Henning Vöpel, membre du conseil d'administration du cep, qui a analysé le Chips Act avec l'économiste Matthias Kullas et le juriste Lukas Harta.

Selon Vöpel, "il est plus pertinent et proportionné d'améliorer massivement les conditions d'implantation européennes pour la recherche et les secteurs de haute technologie. Depuis des années, on constate de graves manquements dans ce domaine". Kullas souligne : "La pénurie actuelle est plus temporaire que structurelle. On s'attend à ce qu'elle prenne fin dès 2023. La pénurie temporaire de puces ne justifie donc pas à elle seule une intervention aussi massive sur le marché". Tout au plus l'UE pourrait-elle, comme le prévoit le Chips Act, fournir des informations aux entreprises afin qu'elles puissent mieux comprendre et gérer les risques dans la chaîne d'approvisionnement des puces.

Harta partage également ce point de vue. Selon lui, il est incompréhensible que l'UE se fixe pour objectif d'accueillir à l'avenir 20 % de la production mondiale de puces. "Cela crée plus de problèmes que cela n'en résout. Il faudra au moins trois ans pour que les premières usines de puces soutenues par le Chips Act puissent produire. La pénurie de puces sera alors déjà résolue", déclare l'expert du cep, qui met en garde l'UE contre une course aux subventions très coûteuse. "Ce danger menace notamment si les conditions-cadres de la politique d'implantation ne sont pas optimales pour la production de puces, par exemple si le personnel qualifié n'est pas suffisant, si l'accès stratégique aux matières premières fait défaut ou si les coûts énergétiques sont trop élevés".

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